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ces en échange de l'entretien qu'il donne, sauf à rompre le marché dès qu'il cesse de leur convenir.

DEVOIRS DES MERES.

LE devoir des femmes de nourrir leurs enfans n'est pas douteux: mais on dispute, si dans le mépris qu'elles en font, il est égal pour les enfans d'être nourris de leur lait ou d'un autre. Je tiens cette question, dont les médecins sont les juges, pour décider au souhait des femmes; et pour moi je penserois bien aussi qu'il vaut mieux que l'enfant suce le lait d'une nourrice en santé, que d'une mere gâtée, s'il avoit quelque nouveau mal à craindre du même sang dont il est formé.

Mais la question doit-elle s'envisager seulement par le côté physique, et l'enfant a-t-il moins besoin des soins d'une mere que de sa mamelle ? D'autres femmes, des bêtes même, pourront lui demander le lait qu'elle lui refuse: la sollicitude maternelle ne se supplée point. Celle qui nourrit l'enfant d'un autre au lieu du sien, est une mauvaise mere: comment sera-t-elle une bonne nourrice ?

Elle

Elle pourra le devenir, mais lentement il faudra que l'habitude change la na ture; et l'enfant mal soigné aura le tems de périr cent fois avant que sa nourrice) ait pour lui une tendresse de mere.

De cet avantage même résulte un insi convénient, qui seul devroit ôrer à toute femme sensible le courage de faire nour rir son enfant par une autre: c'est celui. de partager le droit de mere, ou plutôt i de l'aliéner, de voir son enfant `aimer une autre femme, autant et plus qu'elle de sentir que la tendresse qu'il conserve pour sa propre mere, est une grace, et que celle qu'il a pour sa mere adoptive est un devoir car où j'ai trouvé les soins d'une mere, ne dois-je pas l'attachement d'un fils?

La maniere dont on remédie à cet in-: convénient, est d'inspirer aux enfans du mépris pour leur nourrice, en les traitant en véritables servantes. Quand leur service est achevé, on retire l'enfant, : ou l'on congédie la nourrice; à force de la mal recevoir, on la febute de venif› voir son nourrisson. Au bout de quelques années, on ne 'la voit plus, il ne la connoit plus. La mere qui croit se substituer à elle, et réparer sa néglia 11. Partie. F

gence par la cruauté, se trompe. Au liet de faire un tendre fils d'un nourrisson dénaturé, elle l'exerce à l'ingratitude; elle lui apprend à mépriser un jour celle qui lui donna, la vie, comme celle qui Pa nourri de son lait.

I

Point de mere, point d'enfant. Entr'eux les devoirs, sont réciproques ; et s'ils sont mal remplis d'un côté, ils seront négligés de l'autre. L'enfant doit aimer sa mere avant de savoir qu'il le doit. Si la voix du sang, n'est fortifiée. par l'habitude et les soins, elle s'éteint dans les premieres, années, et le cœur meurt, pour ainsi dire, avant que de naître. Nous voilà dès le premier, pas. hors de la nature.

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On en sort encore par une route opposée, lorsqu'au lieu de négliger, les soins de mere, une femme les porte à l'excès, lorsqu'elle fait de son enfant, son idole ; qu'elle augmente et nourrit sa foiblesse pour l'empêcher de la sentir, et qu'espérant le soustraire aux lois de la nature, elle écarte de lui des at- * teintes pénibles, sans souger combien, pour quelques incommodités dont eller, la préserve un moment, elle accumule, au loin d'accidens et de périls sur sa e

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tête, combien c'est une précaution barbare de prolonger la foiblesse de l'enfance sous les fatigues des hommes faits. Thétis, pour rendre son fils invulnéra ble, le plongea, dit la fable, dans l'eau du Styx. Cette allégorie est belle et .claire. Les meres cruelles dont je parle font autrement; à force de plonger leurs enfans dans la mollesse, elles les préparent à la souffrance; elles ouvrent leurs pores aux maux de toute espece dont ils ne manqueront pas d'être la proie étant grands. :

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Du devoir des meres de nourrir leurs enfans dépend tout l'ordre moral. Vou lez-vous rendre chacun à ses premiers devoirs, commencez par les meres ? vous serez étonnés des changemens que vous produirez. Tout vient successivement de cette premiere dépravation: tout l'ordre moral s'altere, le naturel s'éteint dans tous les cœurs, l'intérieur des maisons prend un air moins vivant; le spectacle touchant d'une famille naissante n'attache plus les maris, n'impose plus d'égards aux étrangers; on respecte moins la mere dont on ne voit pas les enfans; il n'y a point de résidence dans les familles; l'habitude ne renforce plus

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les liens du sang; il n'y a plus ni peres, ni meres, ni enfans, ni treres, ni sœurs tous se connoissent à peine, comment s'aimeroient-ils ? chacun ne songe plus qu'à soi. Quand la maison n'est plus qu'une triste solitude, il faut bien aller s'égayer ailleurs.

Mais que les meres daignent nourrir leurs enfans, les mœurs vont se réformer d'elles-mêmes; les sentimens de la nature se réveillent dans tous les cœurs; l'état va se repeupler ; ce premier point, ce point seul va tout réunir. L'attrait de la vie domestique est le meilleur contre-poison des mauvaises mœurs. Le tracas des enfans qu'on croit importun devient agréable; il rend le pere et la mere plus nécessaires, plus chers l'un à l'auil resserre entr'eux le lien conjugal. Quand la famille est vivante et animée, les soins domestiques font la plus chere occupation de la femme et le plus doux amusement du mari. Ainsi de ce seul abus corrigé résulteroit bientôt une réforme générale, bientôt la nature auroit repris tous ses droits. Qu'une fois les femmes redeviennent meres, bientôt les hommes redeviendront peres et maris,

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