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moins candide

que

lui n'y eût pas manqué, pour

cacher des plagiats plus considérables. Mais Dejille, simple et sans défiance, ou n'y a jamais pensé, ou, s'il y a pensé, n'a pas cru devoir prendre cette timide précaution.

Quel est le poète, d'ailleurs, auquel on ne pourrait pas faire le même reproche? Et, sans aller plus loin, Voltaire ne s'est pas gêné pour s'emparer des idées et des images d'autrui qui lui con

venaient.

Les deux premiers vers de la Henriade:

Je chante ce héros qui régna sur la France,

Et par droit de conquête et par droit de naissance....

sont pris presque mot à mot dans un poëme oublié de l'abbé Cassagnes, et dans lequel Henri IV donnant des instructions à son fils Louis XIII, dit:

Lorsqu'après cent combats je régnai sur la France,
Et par droit de conquête et par droit de naissance....

Quand on parlait de ces plagiats à Voltaire, savez-vous ce qu'il répondait? « Je tue ceux que je » détrousse; autrement il ne faut pas s'en mêler. »

Quelques auteurs ont comparé Delille à Virgile; mais outre l'extrême avantage que la langue donne au poète latin sur le poète français, tout en chéris

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sant la mémoire de Delille comme homme, et en admirant son talent comme poète, je ne puis me défendre de croire qu'il soutiendrait mal la comparaison sous d'autres rapports. Il suffit, pour s'en convaincre, de lire quelques passages de l'Eneïde et de la traduction de Delille, et même quelques uns des Géorgiques, celui de ses ouvrages, où il approche le plus de la perfection de Virgile.

Les Bucoliques, Eglogues, ou Carmina Pastorum, premier ouvrage de Virgile, passent pour une imitation de Théocrite, à qui il aurait même emprunté une partie des Idylles. Le style des Bucoliques est propre aux scènes pastorales, tandis que celui des Géorgiques, dont les sujets sont également pris à la campagne, est plus grave, plus sentencieux : ce ne sont plus les amours et les amusements des bergers, mais des préceptes et des maximes. Les vers héroïques de l'Enéide ne diffèrent pas moins, soit des Bucoliques, soit des Géorgiques. Dans l'Enéïde, tout est sérieux et grand. Les Géorgiques et l'Eneïde, sans contredit les meilleures productions de Virgile, sont cependant des ouvrages qui avaient été demandés au poète; ce qui ne rend que plus extraordinaires les beautés et le génie qu'on y trouve. L'Italie étant ravagée par les guerres civiles, ses habitants avaient perdu l'habitude de la vie.

et des occupations champêtres; Mécène, pour les y ramener, et pour en inspirer le goût, même aux riches habitants de la ville, suggéra à Virgile, alors retiré dans les environs de Naples, le plan des Géorgiques, et l'engagea à y travailler. Les quatre vers qui commencent la première Géor gique, exposent le sujet des quatre livres.

L'Eneide est regardée comme un ouvrage politique, composé dans la vue de réconcilier le peuple romain avec l'idée d'un monarque; car tel était en effet Auguste. Virgile prend pour sujet de son poëme l'histoire de l'origine des Romains: il montre qu'Enée, fils de Vénus et d'Anchise, vint au Latium par la volonté expresse des Dieux; en poursuivant son récit, il montre aussi que la famille Julienne descend de Julus, fils d'Enée, et qu'Auguste est le véritable successeur de Jules-César (1). La conséquence qui ré

(1) C'est d'après cela que quelques savants ont supposé que l'étoile qu'on voit près de l'effigie de Jules-César, sur des gravures antiques, désigne la planète Vénus; mais un plus savant qu'eux, M. le chevalier Visconti, m'a fait observer « que le Julium sidus semble plus probablement désigner la comète qui parut lorsque le jeune Octave, son petit-neveu et son héritier, célébrait à Rome les jeux solennels de ses funérailles (Suetonius, J. César, c. 88). Gette étoile se trouve placée au-dessus de la tête de César, sur les médailles frappées par

sultait de-là, c'est que les promesses des Dieux aux Romains ne pouvaient avoir leur accomplissement que par le moyen de cette race; à laquelle c'eût été une impiété que de se montrer contraire; mais le poëme est si varié, si plein de beautés et d'intérêt, qu'on perd de vue l'intention du poète. Cet ouvrage, qu'on met presque de niveau avec ceux d'Homère, était cependant regardé par Virgile comme imparfait; on assure même qu'il avait ordonné qu'il fût brûlé, et que c'est à Auguste que le monde doit sa conservation.

LE CHEVALIER DE PARNY.

M. le chevalier de Parny naquit à l'île de France en 1753. Il mourut à Paris, à la suite d'une maladie chronique, au mois de décembre 1814.

Sa famille l'envoya de bonne heure en Europe. Il fit ses études à Rennes; et si l'on en juge par

un Sunquinius (Merellius thesaur. familiar. gen. Sunquinia), et auprès de sa tête sur plusieurs autres monnaies frappées après sa mort. Souvent on voit aussi le lituus ou bâton pontifical placé auprès de cette tête sur les médailles, comme symbole de sa dignité de grand pontife. » Je possède une gravure du buste de Jules-César, avec l'astre et le lituus, et au revers an aigle.

il ne

quelques vers conservés dans ses œuvres, fut pas très satisfait de ses premiers maîtres, qu'il appelle enfileurs de mots, et qui lui montrèrent plutôt comme on parle que comme on pense. Ses études finies, il embrassa l'état militaire. « Le temps où M. de Parny fut jeté parmi la

jeunesse française, a dit un écrivain pério» dique, n'était pas celui des bonnes mœurs, » ni du bon esprit, ni peut-être même du bon » goût. Ces traces des principes à la mode >> parurent s'approfondir en lui par le progrès » des ans; et, sans jamais avoir été peut- être » pour M. de Parny des règles bien arrêtées, >> elles devinrent d'insurmontables habitudes. >> Quand son cœur fut épuisé, il ne trouva >> plus qu'elles dans son esprit; elles furent une » des dernières et une des plus malheureuses res>> sources de son talent: on les reconnaît déjà au >> milieu des premiers traits de cette passion à >> laquelle il a su nous intéresser, et pour ainsi >> dire nous associer avec tant d'empire et do >> charmes. Arraché à la société de ses compa» gnons d'armes et de plaisir, et rappelé dans » son pays, il y rapporta les maximes qu'il avait » recueillies, ou plutôt le ton qu'il avait pris >> en France; il les fit servir au succès de son >> amour, et le sentiment le plus vrai comme le

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