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Platon peint son juste imaginaire couvert de tout l'opprobre du crime, et digne de tous les prix de la vertu, il peint trait pour trait Jesus-Christ : la ressemblance est si frappante, que tous les Pères l'ont sentie, et qu'il n'est pas possible de s'y tromper. Quels préjugés, quel aveuglement ne faut-il point avoir pour oser comparer le Fils de Sophronisque au Fils de Marie ! quelle distance de l'un à l'autre ! mourant sans douleur, sans ignominie, il soutint aisément jusqu'au bout son personnage, et si cette facile mort n'eût honoré sa vie, on douteroit si Socrate, avec tout son esprit fût autre chose qu'un Sophiste. Il inventa, dit-on, la Morale. D'autres avant lui l'avoient mise en pratique ; il ne fait que dire ce qu'ils avoiens fait, il ne fit que mettre en leçons leurs exemples. Aristide avoit été juste avant que Socrate eût dit ce que c'étoit que justice; Léonidas étoit mort pour son pays avant que Socrate eût fait un devoir d'aimer la Patrie; Sparte étoit sobre avant que Socrate eût loué la sobriété : avant qu'il eût loué la vertu, la Grèce abondoit en hommes vertueux. Mais où Jesus avoit il pris chez les siens cette Morale élevée

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et pure, dont lui seul a donné les leçons et l'exemple? Du sein du plus furieux fanatisme la plus haute sagesse se fit entendre, et la simplicité des plus héroïques vertus honora le plus vil de tous les peuples. La mort de Socrate philosophant tranquillement avec ses amis, est la plus douce qu'on puisse désirer; celle de Jesus expirant dans les tourmens, jurié, raillé, maudit de tout un peuple, est la plus horrible qu'on puisse craindre. Socrate prenant la coupe empoisonnée, bénit celui qui la lui présente et qui pleure; Jesus au milieu d'un supplice affreux prie pour ses bourreaux acharnés. Oui, si la vie et la mort de Socrate sont d'un sage, la vie et la inort de Jesus sont d'un Dieu. Dirons-nous que l'histoire de l'Evangile est inventée à plaisir ? Ce n'est pas ainsi qu'on invente; et les faits de Socrate, dont personne ne doute sont mieux attestés que ceux de JesusChrist. Au fond, c'est reculer la difficulté sans la détruire il seroit plus inconcevable que plusieurs hommes d'accord eussent fabriqué ce Livre, qu'il ne l'est qu'un seul en ait fourni le sujet. Jamais des auteurs Juifs n'eussent trouvé ni ce ton, ni cette morale; et l'Evangile

si

a des caractères de vérité si grands frappans, si parfaitement inimitables, que l'Inventeur en seroit plus étonnant que les Hérós.

ATHÉISME, FANATISME.

LE spectacle de la nature, si vivant, si animé pour ceux qui reconnoissent un Dieu, est mort aux yeux de l'Athée : et dans cette grande harmonie des Êtres où tout parle de Dieu d'une voix si douce, il n'apperçoit qu'un silence éternel.

Bayle a très-bien prouvé que le Fanatisme est plus pernicieux que l'Athéisme, et cela est incontestable : mais ce qu'il n'a eu garde de dire, et qui n'est pas moins vrai, c'est que le Fanatisme, quoique sanguinaire et cruel, est pourtant une passion grande et forte qui élève le cœur de l'homme, qui lui fait mépriser la mort, qui lui donne un essort prodigieux, et qu'il ne faut que mieux diriger pour en tirer les plus sublimes vertus; au lieu que l'irréligion, et en général l'esprit raisonneur et philosophi que arrache à la vie, effémine, avilit les ames, concentre toutes les passions dans

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la bassesse de l'intérêt particulier, dans l'abjection du Moi humain, et sape ainsi à petit bruit les vrais fondemens de toute société car ce que les intérêts particuliers ont de commun en si peu de chose, qu'il ne balancera jamais ce qu'ils ont d'opposé. Si l'Athéisme ne fait pas verser le sang des hommes, c'est moins par amour pour la paix que par indifférence pour le bien; comme que tout aille peu importe au prétendu Sage, pourvu qu'il reste en repos dans son cabinet. Ses principes ne font pas tuer les hommes; mais ils les empêchent de naître, en détruisant les mœurs qui les multiplient, en les détachant de leur espèce, en réduisant toutes leurs affections à un secret égoïsme, aussi funeste à la population qu'à la vertu. L'indifférence philosophique ressemble à la tranquillité de l'Etat sous le despotisme : c'est la tranquillité de la mort; elle est plus deștructive que la guerre même.

RELIGION.

De combien de douceurs n'est pas privé celui à qui la Religion manque 3

I. Partie.

B

Quel sentiment peut le consoler dans ses peines? Quel spectateur anime les bonnes actions qu'il fait en secret ? Quelle voix peut parler au fond de son ame ? Quel prix peut-il attendre de sa vertu ? Comment peut-il envisager la mort?

Une dernière ressource à employer contre l'incrédule, c'est de le toucher, c'est de lui montrer un exemple qui l'entraîne, et de lui rendre la Religion si aimable qu'il ne puisse lui résister.

Quel argument contre l'incrédule que la vie du vrai Chrétien? Y a-t-il quelque ame à l'épreuve de celui-là? Quel tableau pour son cœur, quand ses amis, ses enfans, sa femme concourront tous à l'instruire, en l'édifiant? Quand, sans lui prêcher Dieu dans leurs discours, ils le lui montreront dans les actions qu'il inspire, dans les vertus dont il est l'auteur, dans le charme qu'on trouve à lui plaire ! Quand il verra briller l'image du Ciel dans sa maison ! Quand une fois le jour il sera forcé de se dire : non, l'homme n'est pas ainsi par lui-même, quelque chose de plus qu'humain règne ici.

Un heureux instinct me porte au bien, une violente passion s'élève; elle a sa raciné dans le même instinct, que ferai

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