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Frankreich, 24. Juni

1862.

tandis que l'Italie s'engagerait, vis-à-vis de la France, à respecter celles l'É- No. 479. glise possède encore. Le Souverain Pontife consentant à se prêter à cette transaction, le Gouvernement de l'Empereur devait tâcher d'y faire participer les Puissances signataires de l'acte général de Vienne.

20 Le transfert, à la charge de l'Italie, de la plus grande partie, sinon de la totalité, de la dette romaine.

30 La constitution, au profit du Saint-Père, d'une liste civile destinee à compenser les ressources qu'il ne trouverait plus dans le nombre réduit de ses sujets. En prenant l'initiative de cette proposition auprès des Puissances européennes, et plus particulièrement auprès de celles qui appartiennent au culte catholique, la France devait s'engager, pour sa part, à contribuer dans la proportion d'une rente de trois millions a l'indemnité offerte au chef de la catholicité. 4o La concession par le Saint-Père de réformes qui, en lui ralliant ses sujets, consolideraient à l'intérieur un pouvoir dejà protégé au dehors par la garantie de la France et des puissances européennes.

Conformément à vos ordres, monsieur le ministre, je m'étais empressé, dès mon arrivée, d'entretenir le cardinal secrétaire d'État des propositions développées dans la dépêche précitée de Votre Excellence. A notre seconde entrevue, je lui en avais donné lecture in extenso, et Son Éminence l'avait hier sous les yeux lorsque, dans une quatrième conférence résumant toutes les précédentes, elle a opposé aux ouvertures dont j'étais l'interprète un refus que tout porte à me faire considérer comme définitif. C'est sous sa dictée, pour ainsi dire, que j'en ai reproduit les termes. Le cardinal secrétaire d'État m'a exprimé tout d'abord les sentiments de reconnaissance qu'inspirait au Saint-Père cette nouvelle preuve, ajoutée à tant d'autres, de la bienveillance de l'Empereur pour le SaintSiége. Il lui était malheureusement impossible d'y répondre autrement que par ce témoignage de gratitude. ¶„Le Saint-Père, m'a dit Son Éminence, ne peut consentir à rien qui, directement ou indirectement, consacre d'une manière quelconque les spoliations dont il a été la victime. Il ne peut aliéner ni directement, ni indirectement, aucune parcelle d'un territoire qui constitue la propriété de l'Église et de la catholicité tout entière. Sa conscience s'y refuse, et il tient à la garder pure devant Dieu et devant les hommes. Le Saint-Père ne peut donc consentir à ce qu'on lui garantisse une partie de cette propriété : ce serait, en fait, sinon en droit, faire l'abandon du reste. Sa conscience, je le répète, ne le lui permet pas. Il s'étonne, d'ailleurs, que ces propositions lui soient soumises avant que le Gouvernement de l'Empereur se soit entendu avec le Piémont, seule cause des désordres actuels. Pourquoi imposer des sacrifices à la victime, plutôt qu'à celui qui l'a dépouillée?" ¶J'ai fait observer à Son Éminence qu'il nous avait paru tout à la fois plus respectueux et plus utile de nous adresser tout d'abord au Saint-Siége. Si le soin de sa dignité nous faisait un devoir de consulter avant tout ses convenances, l'intérêt de la transaction que nous poursuivions ne nous engageait pas moins à nous assurer de son assentiment avant toute autre démarche destinée à l'entourer des garanties du droit conventionnel. Je demandais d'ailleurs à Son Éminence, en présence du regret qu'elle venait de formuler, si, dans le cas où l'Italie eût adhéré

No. 479 la première à nos propositions, le Saint-Père se serait montré plus disposé 24. Juni à les accepter lui-même. ¶ Le cardinal secrétaire d'État m'a répondu négative

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ment. Le Souverain Pontife se trouverait toujours en face de la même question de conscience. ¶ Revenant aux sûretés dont nous nous proposions d'entourer le maintien du statu quo territorial, Son Éminence a insisté sur ce point que les Puissances signataires du traité de Vienne ayant garanti, par cet acte même, la totalité des États de l'Église, il serait étrange et, en quelque sorte, contradictoire, que ces mêmes Puissances fussent invitées à n'en garantir qu'une faible partie. J'ai répondu au cardinal, comme j'avais déjà eu l'occasion de le faire dans une précédente discussion, qu'en principe, l'acte général de Vienne n'avait pas plus solennellement garanti les possessions du Saint-Siége que les autres États dont les limites avaient été fixées à cette époque; qu'en fait les répartitions territoriales opérées alors avaient déjà subi plus d'une atteinte. Je n'avais pas besoin de rappeler à Son Éminence que les mêmes Puissances qui avaient constitué la Hollande en 1815, avaient permis, en 1831, que la Belgique s'en détachât; et, pour ne parler que des changements politiques survenus en dernier lieu dans la Péninsule, ces modifications, elle le savait, avaient été déjà plus ou moins implicitement reconnues par plusieurs des cabinets représentés au congrès de Vienne. Le Saint-Siége avait tout intérêt, dès lors, à voir substituer à cette garantie à laquelle il faisait allusion, garantie générale, inefficace, appartenant plutôt à l'histoire qu'à la politique actuelle, frappée par une sorte de prescription, affaiblie, en tout cas, par plus d'un fait accompli, une garantie nouvelle, spéciale, ne dépendant plus d'un ensemble de stipulations d'autant plus difficiles à maintenir qu'elles étaient plus complexes, mais ayant, au contraire, pour but particulier le règlement définitif d'une question capitale tant au point de vue de l'Europe qu'à celui de la catholicité tout entière. Cette garantie, nous avions le légitime espoir d'y associer les Puissances signataires de l'acte général de Vienne; mais l'adhésion du Saint-Père nous était d'abord nécessaire. Le cardinal secrétaire d'État s'est borné à rappeler les motifs qui ne permettaient pas au Saint-Siége de renoncer, sous quelque forme que ce fût, à une portion quelconque des droits qui étaient bien moins sa propriété que celle du monde catholique. Ces mêmes raisons lui faisaient repousser la clause qui tendait à mettre à la charge du Gouvernement de Turin le payement de la dette romaine: Le Saint-Siége étant le véritable débiteur, m'a dit Son Éminence, consentir à laisser attribuer au gouvernement usurpateur les dettes du gouvernement légitime, ce serait, de la part du Saint-Père, reconnaître la spoliation elle-même. Sa conscience s'y refuse absolument. Aidée des dons des fidèles, Sa Sainteté a pu jusqu'ici faire face à des obligations qu'elle considère comme sacrées. Pleine de confiance dans la divine Providence, elle continuera à remplir ses engagements, et n'y renoncera que lorsqu'elle se verra dans l'impossibilité absolue d'y satisfaire. Le refus obligé de ces propositions, a continué Son Éminence, entraîne nécessairement le rejet de la troisième, qui n'aurait sa raison d'être que dans l'acceptation des deux premières. Si reconnaissant que soit le Saint-Père des dispositions si généreuses que lui témoigne l'Empereur, ainsi que de la proposition dont Sa Majesté se déclare prête à prendre l'initiative à son égard, il lui est impossible de les accepter.

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Il doit les décliner dans l'intérêt de son indépendance, sinon de sa dignité.
cepter une indemnité sous quelque forme que ce soit, ce serait encore recon-
naître la spoliation qu'elle a pour but de compenser. On ne peut accepter la
compensation quand on n'accepte pas le sacrifice, et ce sacrifice, encore une fois,
le Saint-Père n'a pas le droit de le faire. Quant à la dernière question, m'a
dit en terminant le cardinal secrétaire d'État, je n'ai rien à ajouter aux déclara-
tions que j'ai déjà eu l'occasion de faire au prédécesseur de Votre Excellence.
Ces réformes sont prêtes; elles ne seront promulguées que le jour où les provin-
ces usurpées rentreront sous l'autorité légitime dont elles ont été distraites." ¶ J'ai
rapporté textuellement, monsieur le ministre, les paroles dans lesquelles le car-
dinal secrétaire d'État a résumé sa réponse. Je n'importunerai pas Votre Ex-
cellence en reproduisant en détail les arguments que j'ai opposés à chacune des
objections qui m'étaient faites. Pour ne relever que les dernières, j'ai fait ob-
server au cardinal Antonelli qu'en lui proposant le transfert de la dette romaine
au Piémont, nous ne nous étions pas dissimulé les objections que ce projet sou-
lèverait de la part du Saint-Siége. Sérieusement préoccupés, toutefois, d'une
éventualité que le Gouvernement pontifical était obligé lui-même de prévoir, nous
avions à coeur, en le déchargeant d'une dette qui absorberait si vite ses dernières
ressources, de le sauver d'embarras que nous n'envisagions pas avec la même ré-
signation. Le Saint-Siége était engagé vis-à-vis de ses propres populations:
pouvait-il leur imposer le poids de la dette tout entière, jusqu'au moment où il
ne lui serait plus permis de faire face ni aux obligations du dehors ni aux enga-
gements contractés à l'intérieur? Le Saint-Père comptait sur le denier de saint
Pierre; mais nous ne pouvions avoir la même confiance dans une ressource aussi
aléatoire. En déchargeant au contraire ses sujets de sacrifices impossibles à
soutenir, en dispensant les fidèles d'offrandes impossibles à régulariser, en accep-
tant directement des Puissances catholiques les subsides nécessaires à l'entretien
et aux splendeurs du centre de la catholicité, en accordant enfin les réformes
qu'exige l'esprit des sociétés modernes, le Saint-Père se retrouvait plus libre, plus
fort, en face de ses sujets réconciliés, et pouvait consacrer exclusivement les res-
sources du pays, sans que l'Église proprement dite en souffrit, au développement
de son bien-être et de sa prospérité matériels. C'était donc au nom de la pru-
dence, de la justice et du progrès, c'était avant tout dans l'intérêt de la dignité
et de l'indépendance du Souverain Pontife, que nous recommandions ce qu'il re-
poussait comme contraire à son indépendance et à sa dignité. C'était si bien le
voeu de l'Empereur, que sa sollicitude semblait avoir prévu jusqu'au cas, si peu
probable, où notre initiative auprès des autres Puissances européennes resterait
sans résultat, puisque la part que la France offrait dès à présent à elle seule, re-
présentait la totalité de la liste civile actuelle du Saint-Père. Quant à la réso-
lution si nettement manifestée par la cour de Rome d'ajourner indéfiniment des
réformes qu'elle-même a jugées indispensables, de mettre à un acte de justice et
d'humanité pure une condition purement politique, de faire envier et expier tout
à la fois aux populations restées sous l'autorité du Saint-Siége la situation plus
favorable de celles qui ont pu s'y soustraire, je n'ai pas même besoin d'indiquer
les réflexions qu'elle a dû m'inspirer. Je les ai présentées avec d'autant plus de

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No. 479. mesure et de réserve que le terrain sur lequel on se plaçait était plus difficile à 2. Juni défendre. Il me serait impossible, encore une fois, de reproduire dans toutes

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ses phases une discussion qui a rempli quatre entrevues successives. Pénétré des considérations développées dans les instructions de Votre Excellence, comme des vues si généreuses, si élevées qui ont dicté à l'Empereur ce nouvel effort dans le sens d'une conciliation désirable à tant de titres, j'ai la conscience d'avoir épuisé, dans la limite de mes forces, tous les moyens de justifier les propositions dont j'étais l'interprète. J'ai vainement représenté au cardinal secrétaire d'État que les scrupules de conscience dans lesquels se résumaient les objections du Saint-Siége pouvaient et devaient céder devant les réserves de droit que nous nous étions toujours déclarés prêts à admettre de sa part. Ces réserves, la Cour de Rome les avait formulées à d'autres époques; en les reproduisant aujourd'hui dans les termes qu'elle jugerait le plus convenables, elle restait fidèle à ses principes autant qu'à ses traditions politiques. Dans les précédents auxquels je faisais allusion, le Saint-Père trouvait non-seulement sa complete justification, mais un exemple à suivre. En maintenant le droit, il obéissait à sa conscience; en admettant le fait, il donnait satisfaction à la prudence, à la paix et à la charité. Quel immense intérêt n'avait pas le Saint-Siége à sortir d'une situation impossible à prolonger, à entrer dans la seule voie de salut qui lui fût offerte, à se réconcilier avec l'Italie dont ses destinées ne pouvaient être séparées, comme avec les populations dont le soin lui avait été confié, à voir assurer par un acte solennel, entouré d'une garantie européenne, un territoire que notre seule présence lui avait conservé jusqu'ici, à accepter, dans de légitimes compensations, les conditions de dignité et d'indépendance indispensables au libre exercice de ses droits spirituels, à rendre moins lourde aux fidèles une contribution mesurée, aujourd'hui, bien moins à leur piété qu'à des ressources nécessairement de plus en plus limitées; de sauver enfin par des concessions dont l'histoire de l'Église offrait plus d'un exemple, mais jamais dans des circonstances aussi pressantes, Rome de ses souffrances et de son isolement, l'Italie d'une rupture définitive avec la Papauté, l'Europe des graves complications qu'elle redoute, les consciences du trouble qui les agite, la foi du schisme qui la menace, l'Église elle-même d'une des plus rudes épreuves qui l'aient jamais attendue. Lorsque la France, il y a six mois à peine, a invité le Saint-Père à s'entendre avec elle, en principe et sans en fixer les bases, sur une transaction destinée à assurer son indépendance, ses ouvertures ont été repoussées par une fin de non-recevoir absolue. Sa sollicitude ne s'est point lassée. Le Gouvernement de l'Empereur vient de formuler et de soumettre au Saint-Siége les propositions les plus explicites. Chargé de les transmettre, je constate, avec le même regret, qu'elles ont en le même sort. Veuillez agréer, etc.

A Mr. de Thouvenel, etc., Paris.

Lavalette.

FRANKREICH.

No. 480.

Min. d. Ausw. an d. kaiserl. Gesandten in Turin. erkennung des Königr. Italien durch Russland betr.

Die An

Paris, le 26 juin 1862.

Monsieur, ainsi que vous me l'aviez annoncé dans votre rapport confidentiel du 15, M. le général Durando a consigné, dans une dépêche qui m'a été communiquée par M. Nigra, les assurances par lesquelles le cabinet de Turin s'est proposé de satisfaire aux conditions moyennant lesquelles le Gouvernement russe est disposé à reconnaître le royaume d'Italie. Ce document, dont vous n'aurez pas manqué d'avoir connaissance, me paraît donner une complète satisfaction au cabinet de Saint-Pétersbourg. Je me suis empressé d'en transmettre copie au chargé d'affaires de Sa Majesté, et je me plais à penser que cette communication exercera la plus favorable influence sur les résolutions définitives du Gouvernement russe. M. de Budberg a lieu de croire qu'il sera prochainement en mesure de savoir comment elle aura été accueillie par le prince Gortchakoff; toutefois, le Gouvernement russe désirant, s'il est possible, agir dans cette question d'accord avec le Cabinet de Berlin, il faut prévoir qu'il s'écoulera peut-être quelque temps avant que sa décision puisse être annoncée officiellement.

A Mr. Benedetti, etc., Turin.

Thouvenel.

No. 480.

Frankreich,

26. Juni

1862.

No. 481.

FRANKREICH.

- Min. d. Ausw. an d. kaiserl. Geschäftsträger in Turin. Anerkennung des Königr. Italien durch Russland betr.

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Paris, le 8 juillet 1862.

Frankreich,

8. Juli

1862.

Monsieur, vous savez déjà par la dépêche télégraphique que j'ai eu No. 481. l'honneur de vous adresser hier soir que l'Empereur de Russie a résolu de reconnaître le royaume d'Italie. M. le baron de Budberg, chargé de suivre ici les pourparlers qui ont précédé cette résolution, est venu m'annoncer que son souverain était prêt à recevoir un envoyé du roi Victor-Emmanuel et à pourvoir immédiatement après à la nomination de son représentant près Sa Majesté Italienne. Il m'a lu en même temps une dépêche dans laquelle le prince Gortchakoff s'est attaché à indiquer les motifs qui ont déterminé la ligne de conduite suivie par son Gouvernement dans une circonstance si importante. Il résulte de cette communication que le cabinet de Pétersbourg a été surtout guidé par cette considération d'un ordre supérieur et d'un intérêt général, qu'il importait d'aider le roi Victor - Emmanuel à affermir son pouvoir dans de telles conditions qu'il lui fût permis de triompher des opinions extrêmes, de maîtriser les éléments révolutionnaires, et d'offrir à l'Europe les garanties d'un Gouvernement régulier en mesure de remplir ses obligations internationales. Le Gouvernement russe s'est cru d'autant mieux autorisé à suivre cette inspiration que le

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