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Un baiser, à ce coup, n'encharme point sa peine;
Hélas! ni cent. O dieux! à travers longs sanglots,
Dit-elle. quel torrent! comme, inondant la plaine,
Il va déjoindre nos hameaux!

Un chacun sur un bord, las! aurons beau nous rendre ;
Tant bruira sourdement, tant vomira brouillards,
Que ne pourront nos voix, l'un à l'autre, s'entendre,
Ni se rencontrer nos regards.

A tant se tut Blanchette. Or passoit là son père.
De l'orage inquiet, cherchant sa fille au bois,
Puis aux champs, puis par-tout. Quelle surprise amère
Lorsque la voit pâle et sans voix !

Qu'avez, ma chère enfant ?.... En bref par

Silvanire

Instruit, tout dès l'abord, de leurs soucis cruels,
N'est que cela, dit-il? et se prend à sourire;
Et tous deux les mène aux autels.

Hymen les y fêta. Vint Amour en cachette,
Qui, de plus vif encore, enflamma leurs desirs;
Et ce cruel hiver que tant craignoit Blanchette,
La saison fut de ses plaisirs.

LES GRACES.

C'ETOIT un beau jour de printemps.

Les Graces folâtroient sous la feuille nouvelle ;
Quand tout-à-coup des trois sœurs la plus belle,
Aglaé disparut. On la chercha long-temps :

Ce fut en vain. Depuis l'autre feuillage,

Tu le sais, Pan la guette; ah! ma sœur, quel dommage S'il la surprend seule sous un buisson!

Ce Pan est si fougueux, dit-on,

Et la forêt est si sauvage!

Euphrosine en ces mots exhaloit sa douleur;
Et cependant Thalie, errant dans le bocage,
Sous les moindres halliers cherche sa jeune sœur,
Va, vient, frappe un buisson, puis soulève un branchage,
Avance un pas, recule de frayeur,

Craignant toujours, à son passage,

De rencontrer le ravisseur.

Enfin d'un pied léger appercevant les traces,
Les deux nymphes soudain volent vers un bosquet,
Où, dans mes bras, Danaé reposoit.

Eh! qui n'auroit cru voir la plus belle des Graces?

N'est-ce elle trait
pas

pour

trait ?

Te voilà donc, ma sœur, lui dit Thalie!

Tu ris de nous causer un si cruel chagrin?
Chacune alors la saisit par la main,
Et ma bergère m'est ravie.

J'ai beau crier : Arrêtez, arrêtez.

Ce n'est pas votre sœur : Est-elle aussi jolie?
Elles de fuir toujours à pas précipités.

Désespéré, je m'élance. On m'appelle :
Où vas-tu? dit la voix : arrête, Lycidas,
Insensé, vole dans mes bras ;

Viens, sois l'amant d'une immortelle.
Je me retourne, et je vois Aglaé;

Et je la prends pour ma maîtresse,

Comme ses sœurs, pour elle, avoient pris Danaé.
Mon œil y fut trompé, mais non point ma tendresse.
Qui, moi, changer d'amour? Quitte ce fol espoir,
Lui dis-je, si Vénus aspiroit à me plaire,
Vénus y perdroit son pouvoir;

Mon cœur est tout à ma bergère.

Dans mes bras aussi-tôt, malgré ses cris perçans,
J'emporte vers ses sœurs la nymphe palpitante.
Entre elle et Danaé l'on balança long-temps;
Et, sans le feu de nos embrassemens,

On n'eût jamais reconnu mon amante.

LE PANIER.

PHYLLIS, COLETTE.

COLETTE.

PHYLLIS, je vois toujours ce panier à ton bras ?

PHYLLIS.

Oui, Colette, à mon bras je le porte sans cesse ;
Et pour ton beau mouton, vois, tu ne l'aurois pas,
Ni pour un grand troupeau.

COLETTE.

Quelle étrange foiblesse !

A ce panier, dis-moi, qui donne un si haut prix ?
Veux-tu que je devine? Oh! comme tu rougis!

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COLETTE.

As-tu donc peur que je sois indiscrète,
Toi qui connois tous mes secrets?

PHYLLIS.

Eh bien! te l'avouerai-je ? un berger du village,
Le plus beau des bergers, Lycas me l'a donné.
Vois comme il est joli! vois-tu ce verd feuillage,
D'où sort un jeune lis, de roses couronné ?
D'un sentiment bien doux ce panier est le gage.
Aussi, Colette, aussi combien je le chéris!
Si j'y mets une fleur, elle y devient plus belle;
Il donne aux fruits une fraîcheur nouvelle,

Un goût plus fin et plus exquis.

Tu riras, mais apprends jusqu'où va ma folie :
Ma bouche, nuit et jour, le couvre de baisers.
Et puis-je faire moins? Le plus beau des bergers
Me l'a donné comme à sa douce amie.

COLETTE.

Et sais-tu bien quelle chanson,

Il répétoit le jour qu'il finit cet ouvrage ?
Il te l'aura sans doute apprise?

PHYLLIS.

Bons dieux! nou.

Mais toi, d'où la sais-tu ?

COLETTE.

N'en prends aucun ombrage.

Ce jour-là, par hasard, j'entrois dans le bocage,
Je l'apperçus de loin sur un banc de gazon.

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