Il a laissé mon père, en nous quittant ce soir, Au fond du cœur, je ne le voulois guère : Par bonheur, reprit-elle, il veille. Sa chaumière Je vais faire un grand feu. Chaque soir, je le sais, En tournant vers ces lieux ses regards satisfaits. Elle dit, et cédant à l'Amour qui l'inspire, Le bon vieillard dormoit profondément. Doris vole sur le chemin. La peur de s'éloigner un peu trop de son père, Bientôt elle s'arrête, et revient lentement, L'oreille au guet, l'œil sans cesse en arrière Mais quelle image plus affreuse Du haut du mont, le vent, sur la chaumine, Déjà le toit, à demi-consumé, Gémit, s'ébranle et va fondre en ruine. Du chaume en feu qui s'attache à leurs flancs. Quel nouveau trait vient déchirer son ame! Elle entend du vieillard la lamentable voix; Elle arrive, s'élance. Un tourbillon de flamme Loin du seuil embrasé la renverse. Trois fois Elle veut s'y jeter, et trois fois repoussée, De deux bras palpitans elle se sent pressée. Dieux ! mon père !... oui, c'est lui. L'intrépide Tyrcis De la flamme a vu le ravage; part, gravit le mont. Sur de brûlans débris, Il s'ouvre un rapide passage, Il a sauvé le vieux Pélage, Ils sont dans les bras de Doris. O Doris! ô tendre Bergère ! Le vieillard, en les embrassant, Tourne encore un regard vers sa triste chaumière. Que la flamme, dit-il, redoublant sa furie, Tu vis, ô bon vieillard! nous n'avons rien perdu. Le sort, si tu le veux, est prêt à me le rendre. L'OISE A U. MILON, dans un bosquet, avoit pris un oiseau. Du creux de ses deux mains il lui forme une cage; Et par-dessous met le chantre volage. Je vais chercher, dit-il, quelques branches d'osier, Attends-moi là. Dans moins d'une heure, Je te promets, mon petit prisonnier, Une plus riante demeure. Quel plaisir d'offrir à Cloris Ce nouveau gage de tendresse! Il faut que deux baisers au moins en soient le prix. Il dit, part, s'éloigne à grands pas, Mais de quelle douleur son ame est accablée! Tous les baisers avoient pris la volée. Et vois ce qu'en ces lieux j'ai trouvé sous mes pas, D'une colonne, éparse en mille éclats, Le marbre enseveli sous la ronce sauvage. Ne vois-je pas encore une urne renversée ? Allons-y. LE BERGER, la retirant du bourbier. La voilà. LE VOYAGEUR, en la considérant avec effroi Que vois-je ? justes dieux! Quelle scène d'horreur sur ce vase est tracée! Le feu dévorant les hameaux, |