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» que chose aux caprices de son siècle; Parny >> leur refusa tout. Que n'a-t-il respecté toutes les >> sortes de convenances comme il a senti celles » de la composition? Pendant qu'il chantait la » Guerre des Dieux devant les autels des Furies, » Delille embrassait l'autel de la miséricorde, et >> chantait la Pitié. (1)».

(1) Journal des Débats du 23 décembre 1814.

CHANSONS.

LES Français ont un talent particulier pour les chansons, et surtout pour les chansons satiriques, dans lesquelles aucune nation ne les a surpassés. Presque chaque jour, avant la révolution, il en paraissait de nouvelles, applicables à quelque personne ou à quelque événement. Ce talent tient à plusieurs causes : à la gaîté qui caractérise la nation française, au secret qu'elle a de saisir le ridicule et de le rendre sensible; enfin, à la langue, qui a infiniment de mots à double entente. Ils n'ont pas moins produit de chansons amoureuses, que de chansons satiriques; car la galanterie eut toujours beaucoup d'influence sur les mœurs et de la cour et de la ville.

Ils ont aussi un grand nombre de chansons bachiques, parce que le goût du vin et les plaisirs de la table ont long-temps régné chez eux. Alors on chantait à table; mais le ton de la société étant devenu plus mesuré, ce plaisir bruyant a été banni des repas d'un certain monde.

La ronde, qu'on distingue en ronde dansante et en ronde bachique, est une chanson ornée d'un refrain. On dansait en rond, et l'une des personnes dansantes chantait une chanson, dont tous les autres répétaient les paroles : Marlborough s'en va-t-en guerre, etc., est une ronde. Quant à la ronde bachique, elle se chantait toujours à table, et tous les convives étaient obligés de répéter les derniers vers du chanteur, qu'on appelait le refrain, et de faire chorus avec lui.

Un recueil de chansons est en quelque sorte une histoire anecdotique; et il y a des recueils de ce genre dans les cabinets des curieux, avec des notes explicatives. Il en existait un très étendu dans la bibliothèque de feu le marquis de Paulmy.

« On n'aurait pas imaginé chez les Romains, » dit M. de La Harpe, ni même chez les Athé›› niens, aussi légers que les Romains étaient sé>> rieux, de trouver leur histoire dans leurs chan» sons. Celles d'Horace et d'Anacréon n'ont pour

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objet que leurs plaisirs et leurs amours; et les » guerres civiles et les proscriptions n'ont point >> été chez les anciens des sujets de vaudeville....

» En un mot, on peut assurer qu'il n'y a pas >> eu en France un seul événement public, de >>> quelque nature qu'il fût, qui n'ait été la matière » d'un couplet, et le Français est le peuple chan

excellence. Il n'y a, dans toute son » sonnier par » histoire, qu'une seule époque où il n'ait pas >> chansonné, c'est celle de la terreur; dès qu'on >> a cessé d'égorger, les Français ont recommencé >> à chanter. >>

que

Le cardinal de Retz, qui connaissait les hommes et l'art de faire effet sur eux, avait soin d'appuyer ses manœuvres politiques de quelques chansons, qu'il commandait à des faiseurs à ses le cardinal Mazarin, en pargages. On sait lant du peuple, disait cantano, pagaron. Il y a des auteurs qui se sont fait un nom par leurs chansons; tels sont Marigny, Blot, Linière et Coulange, sous le règne de Louis XIV. Il y avait alors un air à la mode, sur lequel sont presque toutes les chansons satiriques. C'est l'air de Joconde, et la coupe de l'air donnait une grande facilité. Les premières mesures servent pour l'exposition, et les autres pour le trait. Tel est le couplet de Coulange sur la noblesse:

D'Adam nous sommes tous enfants,

La preuve en est connue,
On sait que nos premiers parents

Ont mené la charrue;

Mais las de cultiver enfin

La terre labourée,

L'un a dételé le matin,

L'autre l'après-dînée.

Vergier (1), qui est de ce règne, a fait plusieurs chansons très jolies, et une infinité de couplets qu'on chante encore aujourd'hui, tel que celui-ci :

Il dit

A UNE JEUNE DEMOISELLE.

que

AIR: de cors de chasse.

L'Amour aujourd'hui, tout en larmes,
Se plaint hautement de nous deux :
vos yeux ont dérobé ses charmes,
Il dit que mon cœur a dérobé ses feux.
L'Amour aujourd'hui, tout en larmes,
Se plaint hautement de nous deux.

La comtesse de Murat, morte en 1716 (2), ne voulut jamais publier aucune de ses poésies, quoiqu'elle ait fait plusieurs petites pièces pleines d'agrément et de finesse. Le public a retenu ce couplet-ci :

Faut-il être si volage,

Ai-je dit au doux Plaisir ?

Tu nous fuis, ah ! quel dommage!

Dès qu'on a pu te saisir.

Le Plaisir tant regrettable

Me répond: Rends grâce aux dieux ;

Car si j'étais plus durable,

Ils m'auraient gardé pour eux.

(1) Voyez Poètes, sous l'article Vergier. (2) Voyez l'article ROMANS.

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