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Aussi longtemps que le droit de capture de la propriété privée sur mer ne sera pas aboli, il est évident que les corsaires fourniront un appoint important aux états dont la marine militaire sera relativement faible, et qu'ils leur permettront de lutter avec plus de chances contre des ennemis possédant des forces supérieures. Dans un conflit entre les États-Unis d'Amérique et l'Angleterre, cet élément entrerait vraisemblablement en première ligne. Il est donc aisé de comprendre pourquoi, en présence de l'attitude que l'Angleterre a jugé bon de prendre dans ce qui concerne l'abolition du droit de capture, les États-Unis n'ont pas voulu renoncer à la faculté de délivrer des lettres de marque. Dans une déclaration adressée à la chambre de commerce de New-York, le président Buchanan a précisé ce point

be supposed to attach to any such declaration, as changing the ancient and immemorial practice of the law of nations on the subject, must necessarily depend on the general assent of all the maritime states to the new doctrines; that the fact of important maritime powers, such as Spain and the United States, having declined to accede to the declaration of Paris deprives that document of any value between the governments who have signed it; that the consequence of some powers adhering to the new rules, while others retained intact their natural rights in time of war, would be to place the former at a great and obvious disadvantage in the event of hostilities with the latter; that Great Britain being an essentially naval power, this House cannot contemplate such an anomalous and unsatisfactory condition of international obligations without grave misgivings; that independently of all other considerations, the failure after 20 years' negociations to bring about general adhesion to its terms necessitates the withdrawal of this country from what was necessarily and on the face of it a conditional and provisional assent to the new rules; that this House, while desiring to leave the question of oportuneness to the discretion of Her Majesty's government, and having confidence in the repeated declarations on the subject of individual members of the present administration, thinks it desirable to record an opinion that no unnecessary delay ought to take place in withdrawing from the declaration signed at Paris on the 16 th of April 1856, on the subject of maritime belligerent rights. >>

On fit valoir d'autre part, qu'une renonciation à la déclaration de Paris serait contraire à l'honneur et aux intérêts de l'Angleterre, quelque peu satisfaisant que fùt l'état actuel du droit des gens maritime. D'autres encore plaidèrent la thèse de l'inviolabilité de la propriété privée sur mer, à l'exception de la contrebande de guerre. Le gouvernement combattit également la résolution proposée; il fit remarquer que la déclaration de Paris avait reçu l'approbation du parlement en toutes circonstances; qu'il ne pourrait honorablement retirer son adhésio 1. La résolution fut rejetée par 170 voix contre 56. V. Bluntschli, art. 550, 566.

de vue, et il est même allé jusqu'à dire que, tenant compte du petit nombre de navires de guerre des États-Unis, on ne pouvait renoncer à la course; qu'il ne suffirait même pas de proclamer l'inviolabilité de la propriété privée sur mer, qu'il faudrait également interdire le blocus des navires de commerce dans les ports.

§ 35.- Des moyens licites et illicites de faire la guerre.

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1. On a toujours proclamé et le plus souvent respecté le principe qu'il faut, entre ennemis, se conduire honnêtement et de bonne foi. L'adage etiam hosti fides servanda appartient au droit des gens depuis un temps immémorial. Pour le reste, jusque dans les temps modernes, on a regardé comme licite tout moyen propre à atteindre le but de la guerre; cette opinion persiste chez les peuples qui ne sont point à la hauteur de la civilisation moderne. Au cours du xvIIe siècle, la guerre était encore barbare à tous les points de vue; la guerre de Trente Ans nous en offre un exemple frappant. Parfois la discipline était très sévère, mais le meurtre, le viol, l'incendie, le vol, accompagnés de toute espèce de cruautés, se commettaient encore tous les jours en pays ennemi, souvent même sur le propre territoire du belligérant. C'est ce qui explique que pendant la durée de cette guerre la population de l'Allemagne tomba de dix-sept millions d'âmes environ à quatre millions.

Lorsque le droit des gens eut proclamé le caractère juridique de la guerre, on vit naître les efforts tendant à maintenir les hostilités dans les bornes de l'humanité et de l'honneur, à restreindre leurs maux dans la mesure rigoureusement indispensable, à ne pas permettre que cette mesure fût dépassée, sauf en cas de représailles. Même dans la limite de ce qui est exigé pour atteindre sûrement le but de la guerre, on doit res

pecter les usages qui se sont établis durant les derniers siècles. C'est sous cette condition seulement que les chefs d'armée peuvent user de tous les moyens propres à assurer l'accomplissement de leurs devoirs, qui consistent à prendre aussi promptement et aussi complètement que possible les dispositions stratégiques nécessaires, et à veiller à l'entretien et à la sécurité de leurs soldats.

C'est dans ce sens que le congrès de Bruxelles de 1874 a fait, en tête du chapitre intitulé Des moyens de nuire à l'ennemi, la déclaration suivante : « Les lois de la guerre ne reconnaissent pas aux belligérants un pouvoir illimité quant au choix des moyens de nuire à l'ennemi (art. 12). De même, le Manuel de l'Institut de droit international dans son article 4, qui dit en outre « Ils doivent s'abstenir notamment de toute rigueur inutile, ainsi que de toute action déloyale, injuste ou tyrannique. »

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II. Quant à la légitimité des représailles, les opinions diffèrent : « A reckless enemy often leaves to his opponent no other means of securing himself against the repetition of barbarous outrage, est-il dit dans l'article 27 des Instructions américaines pour les armées en campagne de 1863. Il ne saurait être douteux que la violation des lois de la guerre par les uns justifie la non observation de ces usages de la part des autres, et impose en certaines circonstances même des mesures extraordinaires. Mais les lois de l'humanité n'en doivent pas moins être toujours respectées 1. Il ne sera pas toujours possible de renoncer à des satisfactions ou à des réparations accomplies sous des conditions très dures. Dans ces circonstances exceptionnelles on doit absolument exclure la barbarie et l'arbitraire et ne jamais dépasser ce qui est rigoureusement nécessaire pour atteindre le but que l'on poursuit 2.

Bluntschli, art. 567.

2 La conférence de Bruxelles renonça à s'occuper des représailles, bien que la Russie, dans la section IV de son projet, cût formulé des principes sur ce point; le président avait déclaré que le gouvernement russe voulait proposer de restreindre, non de sanctionner les représailles.

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III. Bien que l'emploi des sujets ennemis qui trahissent leur pays soit autorisé, on ne pourra jamais considérer comme licite l'excitation à une trahison semblable, qui constitue un crime de droit commun. Cependant les opinions diffèrent et la pratique n'est pas d'une sévérité excessive à cet égard. Les explications que donne Bluntschli ne font que constater ces divergences et ces hésitations 2.

IV. Sont absolument interdits l'assassinat et l'excitation au meurtre en dehors de la lutte; il est également défendu de répandre des matières empoisonnées dans le pays ennemi ou sur le territoire occupé par l'ennemi, particulièrement d'empoisonner les fontaines, les sources, les approvisionnements, etc.; de favoriser la diffusion des maladies contagieuses en pays ennemi ou dans les camps ennemis. Il est aussi défendu de déclarer un homme hors la loi et de mettre sa tête à prix '.

V. Le respect de la bonne foi est dans l'intérêt réciproque des belligérants. Il est contraire au droit des gens de la violer. Cependant il pourra être difficile de tracer la limite entre la ruse de guerre et la perfidie. Mais la violation de la parole jurée et l'emploi d'un faux drapeau au moment d'en venir aux mains doivent être toujours rejetés comme absolument incompatibles avec le droit des gens (voir pour le droit maritime sur ce point, VIII, 2). Du reste, les opinions diffèrent sur la légitimité de la ruse qui consiste à tromper l'ennemi en usant de

'Ce paragraphe traite de relations qui se présentent surtout dans la guerre sur terre; mais il peut arriver qu'il y ait lieu d'appliquer l'un ou l'autre de ces principes dans les guerres maritimes.

2 Art. 564, et remarque sur cet article. 3 Conférence de Bruxelles, art. 13.

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Instructions américaines, art. 70. Instructions américaines, art. 148. En 1853, pendant la guerre contre les Birmans, les Anglais mirent à prix, pour 2000 roupies, la tête du chef de guérillas Meean-Taon. Ils cherchèrent à justifier cette mesure en déclarant qu'il s'agissait d'un brigand, mais en Angleterre même elle souleva une vive désapprobation.

ses uniformes, de ses drapeaux. Bluntschli estime que cette ruse ne peut se prolonger au delà des préparatifs du combat; dans la bataille même, les adversaires doivent marcher ouvertement et loyalement l'un contre l'autre; Heffter2 dit également que si la ruse peut se prolonger pendant la lutte ouverte, la simulation doit s'arrêter auparavant. La conférence de Bruxelles s'est exprimée ainsi en son article 13: » ... sont interdits:... F. l'abus du pavillon parlementaire, du pavillon national, ou des insignes militaires et de l'uniforme de l'ennemi, ainsi que des signes distinctifs de la convention de Genève.» La question de savoir en quoi consiste l'abus est restée sans solution.

VI. Les destructions inutiles et le pillage dans le territoire. de l'ennemi ne sont plus en harmonie avec le droit des gens actuel. « Le pillage est formellement interdit» (art. 39 de la déclaration de Bruxelles). « Sont interdits:.. G. toute destruction ou saisie de propriétés ennemies qui ne serait pas impérieusement commandée par la nécessité de la guerre » (art. 13).

Toutefois, les chefs d'armée ont une grande latitude à ce point de vue. La conduite des opérations d'une guerre peut justifier la destruction de toute espèce de voies et de moyens de communication, notamment de ports et de chemins de fer, de bâtiments, d'approvisionnements, etc.

VII. Dans le combat ou l'action proprement dite, sont considérés comme illicites :

1. L'emploi d'armes empoisonnées. (Déclaration de Bruxelles, art. 13, A.)

2. L'emploi d'armes ou de projectiles qui causent des souffrances inutiles ou des blessures particulièrement difficiles à guérir, comme la mitraille, le plomb haché, le verre pilé, les flèches barbelées, les projectiles incendiaires ou explosibles

1 Article 565.

2 Article 125.

3 Voir aussi Phillimore, III, art. 94; Wildman, II, p. 24; Henri Brocher, dans la Revue de droit international de 1873, p. 325 et suiv. Instructions américaines, art. 65.

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